MARIVA se souvient

 

*Original F*

 

Le règne des oiseaux

ou le souvenir de la peur de ce qui vient d'en hautMonsieur pie bavard 10982919 10206758830113639 6713574113635031155 n

photo : Bernard Dupont avril 2015

 

débute par ce poème de Daniel Labeyrie 

Chevêches
Petites chouettes des campagnes
Au fin plumage moucheté
Qu'êtes-vous devenues ?
*
Malheureuses victimes trépassées
Du couperet sanglant de notre temps
Où êtes-vous donc passées?
*
En nuits glacées et cieux étoilés
La lune pleure votre absence
Quel lourd silence nous impose l'hiver !
*
Petites boules de plumes
Aux yeux de soufre et de mystère
Qu'êtes-vous devenues ?
*
Messagères de mes rêves
En subtils hululement félins
Où êtes-vous donc passées?
*
Dans vos envols aujourd'hui taris
Comme fontaines et sources abandonnées
Quel désastre dans les jardins de nuit !
*
Petites chevêches de campagnes 
Chasseresses de l'ombre
Qu'êtes-vous devenues ?
*
Souveraines des hangars et des cheminées 
Gardiennes des arbres creux
Où êtes vous donc passées ?
*
Qui nous dira
Petites Chouettes disparues
Pourquoi la lune est orpheline ?

     

l'ami Daniel LABEYRIE ne m'a autorisé 
d'intégrer son délicieux hommage à ces petites chouettes
dans mes souvenirs presque perdus,
dans mes souvenirs notés ici,

et je m'adresse à lui avec une pensée pour un lointain hibou.

 

Cher Daniel,

    Ton poème sur ces chouettes oiseaux disparus de nos oreilles nocturnes, m'a rappelé de jeunes années en Vallée de Chevreuse alors encore préservée de l'urbanisation excessive mais avec une ligne de Sceaux qui nous amenait en vingt minutes au jardin du Luxembourg.

    La petite maison à flanc de colline louée pour le plaisir des enfants était entourée d'un hectare d'herbe follement haute formant une jungle au-dessus des têtes de nos bambins.

    A l'automne il fallait enfermer le chien quand la chasse à courre prenait bruyamment le droit de casser toute enceinte trop frêle.

    La trentaine de pommiers produisait des fruits amers et l'essai d'en faire de la compote ou des confitures avait été abandonné et remplacé par une fabuleuse fête à la chasse aux pommes avec tous les amis qui devaient récolter les fruits à la carabine - chasse au plombs tolérée même par la maréchaussée.

    Dès que la froidure effeuillait les arbres en haut de la colline et jusqu'à la fin de l'hiver, le chant répété « ouhouhou-ou-ouhouhouhouhouou » du hibou noctambule nous faisait savoir qui était le vrai maître de cette vallée si proche d'une mégalopole.

 
 
Pour moi les oiseaux sont des êtres difficilement abordables,
j'en ai peur, - la raison peut-être l'enfance en temps de guerre,

quand tout danger venait des airs; mais l'automne dernier au-dessus de ma maison j'ai vu un vol qui m'avais inspiré les mots suivants:

 


 

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L‘Andalousie

       Les grues sont fatiguées,

      le ciel des Pyrénées bouchés,

à douze sont elles parties ce matin

d’un champ moissonné et de bien loin,

la crainte de la froidure,

et le rituel annuel les y obligent,

il n’y a plus que onze maintenant,

qui volent trop proche de l’océan,

vous êtes trop vieilles pour ce voyage,

posez-vous vite et n’importe où,

la tempête d’automne se lève,

je vois vos battements lents et incertains,

vous êtes trop fatiguées, 

vous ne verrez plus l’Andalousie !

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Et à propos de grues :

      Je suis arrivée en France une première fois et pour sept ans au printemps 1958 et je me souviens que la Palme d'or du festival de Cannes 1958 fut attribuée au film soviétique de Mikhaïl Kalatozov "Quand passent les cigognes", et nous "les étrangers du Quartier latin" nous nous sommes beaucoup questionnés sur cette adaptation du titre à la française, car le titre en russe disait textuellement "Quand les grues volent"!

      Pour éviter cette traduction fâcheusement ambiguë pour une oreille française à cause du double sens du mot « grue » et du mot « voler », les grues sont ainsi devenues cigognes.

      Il faut dire qu'à l'époque, ma naïveté et ma méconnaissance des subtilités de la langue française nécessitaient l'explication du surnom des péripatéticiennes d'Aristote, car je n'avais pas encore compris que le même mot désigne indifféremment une dame, un oiseau et un appareil de levage, dont deux au moins pouvaient voler.

 

 

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