Warten auf Marivas ÜBERSETZUNG - bald - falls Zeit dafür ist
Original F
Berliner Universität 1810
Ein Zug
von
BERLIN nach PARIS
1958
Après le cataclysme d'une guerre suivi d'innombrables bouleversements, Elle n'avait rejoint ses parents à Berlin qu'à l'âge de dix ans pour quitter le domicile parental définitivement à dix sept ans.
En avril 1958 l'école était finie,
la vie d'adulte pouvait commencer !
Partir de la ville enclavée de Berlin-Ouest pour Paris, ville de toutes les libertés : d’abord apprendre la langue et puis explorer la Philosophie et suivre l'Histoire et les histoires sur les chemins des Frères Humboldt.
En 1958 il y avait bien deux universités à Berlin, encore accessibles à tous les Berlinois. - En 1945 (et jusqu'au 12 sept. 1990) Berlin fut divisé en quatre secteurs d'occupation :
soviétique à l'est (devenue Berlin-Est en 1949), américaine, britannique et française à l'Ouest (devenues Berlin-Ouest en 1949).
L'Université Humboldt (dans le secteur soviétique) fut fondée en 1809 par le linguiste et réformateur libéral de l'éducation Wilhelm von Humboldt. Les noms des enseignants et des étudiants les plus connus suffiraient presque à retracer l'ensemble de l'histoire intellectuelle, scientifique et politique de l'Allemagne : en philosophie, Fichte, Hegel et Feuerbach, en physique, Albert Einstein et Max Planck, sans oublier Heinrich Heine, mais aussi Otto Bismarck et Karl Marx. Vingt-neuf Prix Nobel y ont enseigné.
Dans l'après-guerre, les idéologies et les projets politiques divergents des Alliés conduisirent à des dissensions, qui donnèrent naissance à la guerre froide entre l'Est et l'Ouest. Le communisme exerça alors une influence toujours plus forte sur l'enseignement en Allemagne de l'Est et sur l'Université Humboldt de Berlin. Aussi, dès la fin de l'année 1947, des voix s'élevèrent pour réclamer une université libre politiquement. Dix-huit étudiants et enseignants furent arrêtés ou déportés entre 1945 et 1948, beaucoup d'autres disparurent pendant des semaines. Quelques-uns furent mêmes enlevés et jugés en URSS. Au printemps 1948, la direction de l'Université interdisait les cours à de nombreux étudiants, cela sans même passer par une procédure juridique.
Une partie des professeurs et des étudiants fit alors scission, et fonda 1948 "l'Université Libre de Berlin" avec une importante aide financière des administrations officielles des USA, de la Ford Fondation et p.e. de la Rockefeller Foundation dans cette banlieue résidentielle de Dahlem entourée de belle verdure et située dans le secteur américain. Cette nouvelle université de Berlin devient également vite une tanière pour jeunes gens argentés d'Allemagne de l'Ouest qui refusaient le service militaire de la RFA, car les résidents de Berlin-Ouest étaient exempts de cette obligation.
Dans cette guerre froide les deux universités de Berlin étaient idéologiquement à l'opposées l'une de l'autre, mais pour un esprit jeune encore en formation il valait mieux choisir un lieu d'étude situé dans une éventuelle neutralité intellectuelle qui avait déjà été apprécié par les frères Humboldt.
Le linguiste Wilhelm von Humboldt vit à Paris de 1797 à 1799, où il mesure le fossé entre la philosophie kantienne et la philosophie française des Idéologues après la révolution. Les Idéologues pensaient bien à la différence des langues, mais dans un contexte mental bien trop empiriste ou sensualiste.
À la fin de son séjour parisien, il voyage vers l'Espagne pour ses recherches linguistique et avait en1800 visité longuement le Pays Basque en projetant un ouvrage sur "la langue basque et la nation basque étudiée d'après les données fournies par sa langue", puis il fit connaitre le système grammatical de la langue basque en partant d'un exemplaire du Nouveau Testament traduit en basque par Joanes Leizarragaet dédiée en 1571 à Jeanne d'Albret.
Son frère Alexander von Humboldt, naturaliste, géographe et explorateur, s'installe en 1797 à Paris, qui à cette époque est la capitale intellectuelle de l'Europe. Il loge à l'Hôtel Boston, rue Jacob, près de Saint-Germain-des-Prés. Il étudie au Jardin des Plantes, à l'Observatoire de Paris, à l'Institut de France. Il fréquente Cuvier, les botanistes Jussieu, René Desfontaines, Lamarck, les chimistes Chaptal, Thénard, Fourcroy, Louis-Nicolas Vauquelin, les mathématiciens Delambre, Laplace, Lalande et Jean-Charles de Borda. - Le 27 octobre 1806 Napoléon entre en vainqueur à Berlin, puis remporte une victoire décisive à Friedland, le 14 juin suivant. Cette défaite pousse le tsar à signer le traité de Tilsit, le 07 juillet 1807. Fort des nouveaux territoires pris à la Prusse, Napoléon fait renaître la Pologne en créant le Grand-duché de Varsovie.
Sur ce Alexander von Humboldt est envoyé en janvier 1808 par le roi de Prusse en ambassade à Paris pour faire diminuer le montant des indemnités de guerre. Humboldt reste à Paris et peut se consacrer à ses travaux. Depuis que la France a envahi la Prusse, Humboldt ne reçoit plus de revenus de ses domaines. Il vit donc à Paris dans une chambre meublée qu'il partage avec Gay-Lussac, rue de la vieille Estrapade, puis rue d'Enfer, près de l'Observatoire. - Il était membre associé de l’Académie des sciences française et président de la Société de géographie de Paris.
L'existentialisme est un humanisme
– elle appréciait Sartre dans cette déclaration, cela pouvait être lu sans efforts dans sa simplicité par une adolescente, dans sa ferveur elle ne toucha plus jamais au magazine allemand « Der Spiegel », depuis qu’à la fin des années cinquante du dernier siècle il y a eu un article dédaigneux sur Sartre et sa compagne Simone de Beauvoir.
La révolte juvénile devait se limiter aux pensées autonomes mais tacites, car selon une vieille chanson allemande sur la liberté d'opinion de la fin du 18e siècle
"Die Gedanken sind frei"
(Les pensées sont libres).
L'honneur et le respect dû aux générations précédentes étaient encore inculqués avec rigueur dès la prime enfance. Pour aider les petits à grandir, il n'y avait pas - comme maintenant - le décodage d'un livre d'image avant le "dodo", mais dès leurs premiers balbutiements ces bambins étaient tenus à réciter sagement la petite prière du soir:
Ich bin klein,
mein Herz ist rein,
soll niemand drin wohnen, als Jesus allein.
Je suis petit, mon cœur est pur, il n'y a que Jésus pour y résider.
La coutume voulait l'usage fréquent de punitions corporelles, tant en famille qu'à l'école et ceci à la moindre désobéissance ou petite révolte. On devait donc accepter l'autorité de ces parents qui pour la plus part avaient succombé à la fascination d'un fascisme raciste et xénophobe, mettant en seulement douze ans le monde à feu et à sang! Ils se réclamaient d'une "culture humaniste", mais refusaient aux enfants le droit de poser ces questions qu'ils ne voulaient pas entendre et auxquelles eux-mêmes ne cherchaient peut-être plus les réponses.
Dans l'après-guerre la "civilisation" renait enfin et anime à nouveau l'admiration pour les artistes interdits par le régime nazi en tant que "Art dégénéré".
Son tableau favori était peint en 1926 par le surréaliste Max Ernst
devant trois témoins:André Breton, Paul Éluard et le peintre"
La vierge corrigeant
l’enfant Jésus
.
l'enfant perd son auréole - 1926,-196 x 130 cm, - Musée Ludwig, Cologne
En regardant l'auréole de l'enfant tombée à terre
tout peut se remettre en question, car selon Sartre
l'homme
est condamné
à être libre
Pour ce voyage vers Paris le train partait tous les jours de la station du « Jardin Zoologique », la seule sortie ferroviaire de l’enclave de Berlin-Ouest.
Bahnhof Zoo 1958
L’ami fidèle depuis près de deux ans et déjà à la fac de Dahlem pour les mathématiques, n'avait été mis au courant du départ pour Paris qu'à la dernière minute; bien qu'Elle ne lui demandait pas son avis, il avait catégoriquement refusé son accord pour cette séparation, - la philosophie ou d'autres matières superflues réservées aux filles pouvaient fort bien s'étudier à "l'Université libre de Berlin-Dahlem", d'autant plus qu'il était dérisoire de partir pour Paris sans parler un mot de français.
Lui n'était arrivé de Rhénanie que pour ses études et n'avait jamais ressenti dès l'enfance cet enfermement oppressant dans l'enclave berlinoise. Elle - en voyant les trainées blanches des avions dans le ciel si bleu de sa ville natale, ressentait toujours une envie terrible d'évasion.
Comme les parents étaient plutôt contents de son départ, Elle avait rapidement prise sa décision avec une absolue confiance en son étoile. Arrivée à la gare elle montait joyeusement sa valise vers le quai du train venant quotidiennement de Moscou via Varsovie.
Sa mère, comme toujours très belle femme dans un manteau en popeline couleur canari, l’accompagnait pour l’adieu.
Quand Elle déposait son bagage dans l’entrée d'un vieux wagon d'avant-guerre, un grand cri l’alertait :
Imprévu et inattendu - son jeune et fidèle ami était en train de soulever et de malmener à la force de ses bras la mère stupéfiée. Il lui reprochait à forte voix d'avoir autorisé le départ de sa fille, qui n’avait même pas dix-huit ans et qui sera encore mineur pendant au moins trois ans (la majorité ne passera de 21 à 18 ans qu'en 1974), et à qui l'on devait absolument interdire un tel voyage hasardeux.
Et le train partait tandis que la mère était toujours secouée par l’ami possessif. Personne ne faisait un signe d’adieu de la main pendant que Berlin s'éloignait.
Dans la première moitié du siècle dernier la 3e classe était la plus abordable pour voyager en train, offrant peu de services et de conforts (bancs en bois) pour un prix modique; c'était la classe des gens modeste.mais à moindre coût.
Ce que les gens voyageant en 1iere et même 2ème classe ne semblaient jamais savoir : l'avantage de ces wagons-là était qu'ils arrivaient en même temps à destination que les classes "supérieurs" mais à moindre coût.
Cette "classe bois" fut bien supprimée en 1956 dans toute l'Europe, mais la majorité des voitures de 3e fut alors lucrativement réaffectée à la 2ème classe. - Par son enfance dans l'après-guerre elle connaissait la 3e classe, mais grâce à cette suppression il lui fallait acheter en 1958 un ticket de 2e classe pour Paris tout en voyageant encore en "classe bois" dans un compartiment de huit places.
L'usage du cabinet n'était réglementé qu'en trois langues, mais l'avertissement en quatre langues "ne pas se pencher au dehors" faisait croire que ces curieux wagons venaient de Moscou, sautaient les Alpes pour Rome, traversaient les pleines du Nord pour Paris, et savaient même nager jusqu'à Londres.
En ces temps lointains il y avait bien plus de wagons fumeurs que de non-fumeurs, et l'on évitait instinctivement les compartiments non-fumeurs qui avaient de drôles d'odeurs indéfinissables souvent couvert du fort fumet d'un saucisson à l'ail périmé.
Les compartiments fumeurs venant de l'Europe de l'Est ne sentait pas le bon cigare de la Havane de la famille Davidoff mais plutôt
la Papirossa russe bourrée de Machorka
Même par beau temps, Elle avait toujours l'impression que le TRANSIT de la « Zone soviétique » se faisait en noir et blanc des films muets. De l'enclave Berlin-Ouest on traversait la RDA sans autorisation d’une halte, avec l’interdiction de tous contacts visuels - même pas un signe de la main (eh bien sur : ne pas se pencher au dehors) !
Les façades bordant les voies ferrées en RDA propagent en lettres immenses les avantages de l’amitié allémano-soviétique et les mérites du socialisme communiste.
© Deutsches Historisches Museum, Berlin Inv.-Nr.: P 65/1581 Halle/Saale, 1953
C'était sinistre! Le train D 105/106 Paris - Moscou roulait au maximum à 50 km à l'heure et - selon les fréquences et l'intensité des contrôles - il fallait quatre à cinq heures pour les 190 kilomètres depuis Berlin jusqu'à la gare frontalière de Marienborn - encore en RDA dans l'hémisphère Est de la guerre froide.
Puis il y avait le passage du "no man's land", une zone interdite d'au moins 5 km, et "le rideau de fer" se levait enfin à l’autre gare frontalière de Helmstedt située en RFA dans l’hémisphère Ouest de la même guerre froide.
les rares possibilités de passer la frontière entre la RDA et la RFA
On était donc arrivé en zone britannique de la République Fédérale allemande, l'autre Allemagne que l'on ne quittera plus jusqu'à la frontière belge à 5 km d'Aix la Chapelle.
Après le 8 Mai 1945 l'Allemagne et l'Autriche ont été divisées en quatre zones occupées par l'Union soviétique, Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France. L'occupation en Autriche a durée jusqu'au 25 octobre 1955.
Pour les deux Allemagnes cela n'était pas aussi facile, bien que depuis les années soixante on n'utilisait plus trop le mot d'occupation, ni à l'Est ni à l'Ouest, les troupes alliées étaient toujours bien présentes, même si c'était dans le cadre de l'Otan ou du pacte de Varsovie.
C'est avec la chute du mur de Berlin le 09 nov. 1989, qu'une normalisation à été mise en route par le Traité de Moscou entre les représentants des deux Allemagnes ainsi que les quatre puissances alliées de la Seconde Guerre mondiale, la France, les États-Unis, le Royaume-Uni et l'URSS. Sa signature le 12 sept. 1990 ouvrit la voie pour la réunification allemande le 03 oct. de la même année.
les quatre zones d'occupation en Allemagne de 1945 -> 1990
Après le "rideau de fer" on se retrouvait en "pays de cocagne", le capitalisme tant décrié par les communistes faisait son étalage. - On sait que les trains ne traversent pas que de vertes campagnes, mais dans l'après-guerre c'étaient surtout des friches industrielles; en Allemagne de l’Ouest, en Belgique ou en France, l'extrême laideur des façades délabrés, noircies, interrompues par des ouvertures béantes, invite à s'y défénestrer sans délais.
Seul petit plaisir le regard sur la déchéance des publicités délavées d’un temps qui n’existait plus :
En Allemagne on devait être obsédé par un besoin
de laver les vestes encore plus blanches;
puis vers la France,
c'étaient plutôt les plaisirs de la bouche.
En ces temps là - et jusque dans les années quatre-vingts du siècle dernier - pour de longs trajets les wagons de 2nd classe étaient encore divisés en compartiments pour six à huit voyageurs, fermés par une porte coulissante vers le couloir. - Il y avait bien plus de compartiments FUMEURS que de non-fumeurs.
Ce brave Jean Nicot, 1559 ambassadeur de France à Lisbonne avait envoyé à Catherine de Médicis de la poudre de tabac pour soigner les migraines de son fils (François II). De retour en France peu après 1560, Nicot eut la surprise de découvrir qu’en son honneur, le mot savant « nicotiana » ou « nicotiane » était entré dans les dictionnaires tandis que le bon peuple se ruait sur « l’herbe à Nicot ». Pourtant il aurait tant aimé de n'être connu que par ses propres dictionnaires du latin et du vieux "françois". Colbert faisait de la fabrication et de vente du tabac déjà un monopole royal pour remplir les caisses de l'état comme de nos jours - et déjà en ce temps-là les soldats de Louis XIV recevaient du « tabac de groupe ».
Au début une plante médicinale: on la respire, on la fume, on la suce, on la boit même en décoction. Au cours du XVIe siècle, le tabac est acclimaté en Europe. On commence à le vendre en poudre, puis en « carotte » qu’on râpe. On le prise ou on le chique. Seuls les marins le fument. Au 19e siècle le cigare gagne la bourgeoisie; le tabac à priser est remplacé par la pipe et la cigarette manufacturée depuis 1842. Il paraît que c'était dans les tranchées de la guerre de Crimée (1853-56) que Français et Anglais apprirent des troupes russes l’art de rouler les cigarettes. Mais c’est le XXe siècle, avec ses deux guerres et son nouveau genre de vie, qui va voir le triomphe de la cigarette. En 1950 Graham et Wynder publient la première étude épidémiologique faisant le lien entre tabac et cancer du poumon. Les premières évocations du risque tabagique apparaissent dans la presse, ce qui entraine en 1952 l'invention de la cigarette filtre présentée comme moins toxique.
Elle avait trouvé une bonne place dans un compartiment fumeur "classe bois". La cigarette pouvait y créer une de ces convivialités ancestrales des gens qui ne se connaissent pas et doivent partager la même grotte pour un temps déterminé.
Dès que l'on sortait le paquet, on en offrait à la ronde des huit convives, et la conversation démarrait aussitôt. Chacun racontait sa vie, donnait son histoire ou plutôt une histoire. En ces moments-là il n'est pas important qu'une histoire soit vraie mais il faut qu'elle soit bonne !!
Que de belles aventures elle entendait tout au long de sa vie dans des compartiments fumeurs en fuyant les non-fumeurs d'antan qui étaient tristes, sans imagination et sans prouesse inventée.
les quatre secteurs d'occupation de Berlin
Le train Moscou - Paris s'était d'abord arrêté à la Gare de l'Est dans le secteur soviétique de Berlin; - deux jeunes couples, manifestement bagués donc mariés, se trouvaient déjà dans le compartiment quand Elle y montait à Berlin-Ouest, gare du Jardin Zoologique dans le secteur britannique.
Les quatre semblaient se parler en français - un drôle de français avec beaucoup d'expressions manuelles, qui illustraient comme une langue des signes leurs paroles.
Au Lycée Elle n'avait fait que ses "humanités", que des langues anciennes alors, et quand on lui proposait une cigarette, Elle s'excusait en allemand de ne pas fumer et de comprendre encore moins la langue de Molière.
Tout le monde riait et on lui expliquait que la langue française ne leur était pas trop familière non plus, mais qu'ils avaient été choisi pour rencontrer des responsables des Jeunesses Communistes de France. Comme en classe ils n'avaient appris que langue et l'écriture du grand frère soviétique, on leur avait trouvé une vieille demoiselle, professeur à la retraite, pour un cours condensé et accéléré en quelques semaines; et c'était cette demoiselle qui leur avait fermement conseillé de ne plus s'adresser la parole qu'en français. Ils y avaient trouvé un certain plaisir pour en faire un petit jeu en étonnant leur entourage.
Les présentations faites, on avait encore environ 20 heures à passer ensemble jusqu'à Paris. En 1958, le train partait dans l'après-midi de Berlin et allait arriver à destination le lendemain tard dans la matinée. Au troisième millénaire le train part de Moscou à 23:44 - de Berlin Hauptbahnhof (gare centrale) le surlendemain à 00:29 - et arrive à Paris à 09:59.
Ils étaient deux frères de 23 et 24 ans mariés aux deux jeunes femmes de 21 ans. Il y avait eu une belle fête familiale pour unir les deux couples en été 1957. L'âge moyen du 1er mariage en RDA en 1957 était de 24,6 ans pour les hommes et de 23,2 ans pour les femmes.
On avait invité tante Ruth habitant la région parisienne avec son époux, qu'elle avait trouvé quelques années auparavant dans une des casernes du "Quartier Napoléon" du secteur français à Berlin-Wedding. - Là Elle prenait sa première leçon de prononciation de la voyelle "u" en français. Tous les quatre s'amusaient à articuler le nom de "Ruth" à la française comme "en RUT" tandis qu'en allemand cela se prononce comme "une ROUTE à la campagne".
Mais leur propre dialecte allemand indiquait clairement qu'ils venaient tous de la Saxe! Ils disaient alors de ne venir "ni de LEIPZIG, ni de DRESDE" - Elle, ayant apprit sa leçon de géographie du pays, rétorquait aussitôt CHEMNITZ. - Mal lui en a pris, car le quatuor protestait d'une voix
Nous sommes de KARL-MARX-STADT (pour l'oreille en dialecte saxon: Gorl-Morx-Chtod) !!!
La fille de Berlin-Ouest capitaliste avait donc sans le vouloir, manqué de respect aux jeunes gens d'une ville communiste sur un sujet sensible et s'en excusait. Il est vrai qu'en République Démocratique Allemande = RDA , la ville de CHEMNITZ (~ 200 000 habitants - fondée vers 1143) avait pris le nom de Karl-Marx-Stadt de 1953 jusqu'à un référendum en 1990.
Comme une grande partie de sa famille habitait à Berlin-Est - imaginez qu'à Paris d'un jour à l'autre on sépare les gens rive gauche des gens rive droite, ELLE connaissait et pratiquait très bien le "modus vivendi" de mettre entre parenthèse tout sujet politique, quand des amis ou des membres d'une même famille de l'Ouest ou de l'Est de Berlin se rencontraient. En 1958 on se voyait frequemment et on circulait encore librement dans les quatre secteurs de Berlin, ceci jusqu'à la construction du mur en 1961.
La conversation restait donc sur des histoires vécues en privé; et Elle ne se permettait pas de leur demander où ils étaient le 17 juin 1953 lors de la révolte du peuple est-allemand contre le gouvernement communiste installé par l'Union Soviétique, bien avant que les chars soviétique achèvent la révolution hongroise en 1956 ou le Printemps de Prague en 1968.
L’insurrection du 17 juin 1953 en Allemagne de l'Est est un soulèvement populaire qui éclate à Berlin-Est et dans le reste de la République démocratique allemande en se prolongeant les jours et semaines suivantes. Pendant la nuit, plusieurs entreprises se mettent en grève. Le 17 juin, l'agitation gagne très vite le reste du pays. Plus d'un million de personnes descendent dans les rues des principales villes (Leipzig, Magdebourg, Dresde, etc.) de la RDA. Une foule de 60 000 personnes attaque les locaux de la police, conspue les dirigeants, incendie les sièges des journaux, etc. Après l'incendie d'un entrepôt (la Columbushaus) et l'implication d'ouvriers venus de Berlin-Ouest dans les émeutes, Walter Ulbricht décide de faire appel aux troupes soviétiques. L’intervention d’une colonne de chars et des forces de l’ordre se solde par la mort d'une cinquantaine de manifestants à Berlin-Est et de nombreux blessés, les soldats tirant alors à vue sur des citoyens désarmés. 3 000 personnes sont arrêtées par les Soviétiques et 13 000 sont emprisonnées par les autorités de la RDA.(source Wikipedia)
chars soviètiques à Berlin
proclamation de l'état d'urgence à Berlin le 17-06-1953
proclamation de l'état d'urgence à Karl-Marx-Stadt le 17-06-1953
char soviètique à LEIPZIG le 17 juin 1953
ATTENTION : vous quittez Berlin-Ouest
Elle souhaite raconter un peu de
son petit vécu du 17 juin 1953
Comme tous les jours Elle prenait la S-Bahn le 17 juin 1953 pour se rendre au "Lycée Ulrich von Hutten" à Berlin-LICHTENRADE (similaire au RER, mais sous contrôle soviétique dans la totalité des secteurs alliés de Berlin). Lichtenrade était la dernière gare située à Berlin-Ouest, mais comme avant-guerre le train continuait son trajet en zone d'occupation soviétique (RDA) via MAHLOW jusqu'à son terminus de RANGSDORF.
Ce lycée était fréquenté par des écoliers de Berlin-Ouest mais jusque à cette date aussi par les jeunes de la proche banlieue située en RDA, notamment une camarade classe et sa sœur plus âgée d'un an.
Le matin du 17 juin 1953 on était arrivé normalement à la gare de Lichtenrade pour nous rendre en classe; l'enseignement se terminait comme d'habitude vers 13 heures; on avait bien sûr écouté attentivement sur les transistors les évènements à l'Est, - de retour sur les quais de la gare, l'information est donnée qu'aucun train ne dépassera plus la limite des secteurs alliés de l'enclave de Berlin pour les terminus situés en zone soviétique (RDA).
Les deux sœurs ne pouvaient donc plus rentrer chez elles. - Depuis Rangsdorf leur père, qui était pasteur et avait donc une autre conception de la société que le communisme, téléphone au proviseur lui demandant de trouver un hébergement provisoire pour ses filles, qui seront prises en charge rapidement par son frère habitant en RFA. - Par cet acte courageux les parents préféraient se séparer irrémédiablement de leurs enfants pour ne pas les scolariser sous un régime qui ne leur convenait que peu !
Les quatre voyageurs de Karl-Marx-Stadt travaillaient dans une grande usine nationalisée de machines-outils, les deux frères comme ingénieurs, l'une des épouses était dans la production, l'autre dans l'administration; mais les quatre étaient également des membres très actifs dans la "FDJ", l'organisation de la jeunesse communiste, 50 % des jeunes de la RDA étaient adhérents actifs en 1958.
Affiche de la création de l'organisation jeunesse FDJ dans le district CHEMNITZ
Les organisations pour les enfants et la jeunesse et leur importance au sein de la RDA
"Les Pionniers" était dans la République démocratique allemande (RDA) l'organisation de masse pour les enfants. Elle comprenait presque tous les élèves de la première à la septième année scolaire en tant que juniors, et a été incorporé dans le système d'éducation socialiste unifié de la RDA. L'organisation a toujours placé le collectif au centre d'une éducation socialiste dans le marxisme-léninisme, l'individualisme n'était pas souhaitable. Le port d'un foulard bleu était le signe d'appartenance des 6 à 10 ans - puis le foulard rouge jusqu''àà 14 ans. Vers 1958 plus de 50 % des élèves sont membres, en 1989, l'année de la chute du mur de Berlin environ 98 % des enfants d'âge scolaire qui ont été membres de l'organisation Pionniers. Au début de la 8e année scolaire (~14 ans) on entrait dans la jeunesse allemande libre (FDJ). - l'intégration des jeunes continuaprès l'école par le service militaire, puis l'instruction de la matière obligatoire du Marxisme-Léninisme pour tous les étudiants universitaires; et plus tard en activité en tant que membre de la Fédération des Syndicats Libres d et la Société pour l'Amitié Germano-Soviétique . Un citoyens est-allemands était impliqué dès l'âge de six ans jusqu'à la fin de sa vie de travail dans diverses organisations socialistes.
La FDJ = Jeunesse libre allemande était le mouvement de jeunesse officiel des 14-25 ans de la RDA. Les premiers groupes de la Jeunesse libre allemande furent constitués avant la Seconde Guerre mondiale, en exil, à Paris en juin 1936. L'organisation avait pour mission de diffuser le marxisme-léninisme au sein de la jeunesse et de lui donner une « éducation socialiste ». Les objectifs que la Jeunesse libre allemande s'était fixés, étaient l'approfondissement de l'amitié avec l'Union Soviétique et le soutien à tous les peuples du monde en lutte contre l'impérialisme. Ainsi des brigades de la FDJ participèrent à la construction du gazoduc Droujba et de la ligne de chemin de fer Baïkal Amour Magistral (BAM) en Union soviétique ou travaillèrent comme bénévoles humanitaires au Nicaragua, au Mozambique et en Angola.
À côté des objectifs idéologiques, l'organisation des loisirs et de la culture (culture de jeunesse en RDA) de ses membres représentait également une fonction essentielle de la Jeunesse libre allemande. Elle géra ainsi des clubs de jeunes, des auberges de jeunesse et elle organisa des voyages à l'étranger, mais les voyages dans les pays occidentaux étaient généralement inaccessibles aux « membres normaux ». (source Wikipedia)
Comme Elle,
ces quatre jeunes gens
n'avaient rien connu d'autres
pendant leur enfance
que la guerre.
Leur ville très industrialisée de Karl-Marx-Stadt (Chemnitz) avait avant la crise 1929 plus de 360 000 habitants, on l'appelait le "Manchester" de la Saxe. En début 1945 le centre historique de la ville et les banlieues avaient été presque entièrement détruite par des raids aériens alliés, la plupart des usines étaient détruites où démantelées et envoyées au titre des réparations de guerre en l'Union soviétique. La reconstruction de cette ville ouvrière s'est faite avec l'enthousiasme communiste d'après-guerre dans la tradition du mouvement prolétaire allemand.
Mais dans l'après-guerre ils avaient vécu dans cette mouvance communiste une toute autre jeunesse qu'Elle dans l'enclave du Berlin-Ouest "capitaliste". A l'Ouest il y avait que le "plus jamais ça" et à l'Est l'espoir presque religieux d'une toute nouvelle société égalitaire.
Ils racontaient que l'année auparavant lors de leurs mariages la tante Ruth et son époux français les avaient invité pour un voyage de noces à Paris, villes des lumières et de l'amour. C'était un rêve qu'ils croyaient irréalisable; c'était sans compter sur l'énergie et le dynamisme de la tante Ruth, qui mettait tout en œuvre. Ce n'est pas pour rien qu'elle habitait depuis dix ans à Saint-Denis au nord de Paris, dans un « bastion » du Parti communiste français.
-
Ancien siège de L'Humanité à Saint-Denis - Oscar Niemeyer - inauguré en 1989
Elle y mettait quelques semaines, mais avec l'aide d'Auguste GILLOT, le maire d'alors, et quelques autres amis communistes fut trouvée la solution avec la nécessité absolue d'un échange des Jeunesses Communistes de France et de la RDA.
Une invitation officielle fut lancée. - Mais cela prenait des mois pour recevoir le consentement des autorités compétentes en RDA. On s'était adressé au Premier Secrétaire de la direction du district de Karl-Marx-Stadt, qui avait transmis la demande à Berlin. Finalement l'autorisation et les visa étaient venus du Premier Secrétaire du Conseil Central de l'organisation de la jeunesse est-allemande FDJ.
Le voyage de noce d'abord inespérés puis tant attendus pouvaient commencer!
Pour l'information est encore à noter qu'à Saint Denis fut créé en 1958:
L’ASSOCIATION FRANCE-RDA, COMITE DE SEINE-SAINT-DENIS
Jusqu’en 1970 environ, elle s’intitule : « Echanges franco-allemands. Association pour la coopération avec les deux Etats allemands et la reconnaissance de la RDA ». Elle publie à cette époque un bulletin Rencontres Franco-allemandes - Seine Saint-Denis. Elle s’organise en comité locaux et un comité national. Au début, il existe 8 comités locaux qui se sont développés par la suite dans les municipalités et même les entreprises. Le 9 février 1973, a lieu la reconnaissance diplomatique de la République démocratique allemande par le gouvernement français. En mai 1973, en découle un nouvel intitulé de l’association : « Association française pour le développement des échanges et de la coopération entre la France et la R.D.A. », qui deviendra par la suite : « France RDA ».
Objectifs de l’association: Outre le développement des contacts et des échanges entre les deux peuples dans différents domaines, jusqu’en 1973 l’objectif principal de l’association fut la reconnaissance diplomatique de la RDA. Après l’obtention de celle-ci, l’association s’est efforcée de « tout mettre en œuvre pour que soient signés très rapidement les accords consulaires qui permettraient aux citoyens de la RDA de bénéficier de la protection juridique de leur gouvernement... » et ainsi de reconnaître la citoyenneté des ressortissants de la RDA. (source: les archives du département Seine-Saint-Denis)
Avait-il fortuitement
une cause à l'effet ?
*****
Le soir tombait, les cinq voyeurs du compartiment fumeur, n'avaient même pas envisagé de savoir si le train avait des couchettes ou un wagon restaurant; cette génération d'après-guerre ne dépensait que si c'était absolument nécessaire. - Pour ces vingt heures de trajet, Elle n'avait pensé qu'à se faire deux tartines de pain noir et fromage, d'emporter trois pommes puis un paquet de biscuits. - Mais les deux couples avaient prévu un véritable repas du soir à l'allemande avec une salade de pommes de terre et des boulettes de viande, de vraies assiettes, fourchettes, serviettes en papier, poivre et sel, moutarde, et des bouteilles de bière. Quand il y en a pour quatre, il y en a pour cinq, un vrai régale - sauf pour la bière - Elle n'enboira jamais de sa vie
Le "dessert surprise" montait à bord à BIELEFELD; - un Monsieur d'un certain âge, qui disait d'avoir réservé sa place à la fenêtre. On lui laissait donc un des coins fenêtre pour accrocher son gros manteau en lui proposant une cigarette afin d'engager la conversation; il commençait alors à parler de façon confuse que tout cela n'était que "du pudding", et ce pudding avait ramollit leurs cerveaux. - Il disait fuir cette ville sournoisement parfumée au flan vanillé pour rentrer à EUPEN. Comme à Eupen les Belges parlent allemand, il avait répondu à une alléchante offre d'emploi en tant que chauffeur de maître venant de cette ville de la poudre à faire lever la pâte, et qu'il était arrivé tout droit dans la dictature d'un capitalisme pur et dure. Toute la ville n'appartenait qu'à un seul homme et faisait la courbette devant le maître et sa famille. Puis l'inconnu belge cachait sa tête dans les plis de son manteau en demandant de le réveiller avant la frontière belge. - Ce monologue rimaient tellement avec la propagande anti-impérialiste de la guerre la plus glaciale, que même les deux couples communistes étaient stupéfiés.
En 1891, le Dr. August Oetker, un pharmacien de Bielefeld inventa la levure chimique dans une pièce à l’arrière de son officine. Ce fut le début d’un empire qui mènera la marque «Dr.Oetker » au succès. Le groupe Oetker qui ne cessera de s’agrandir, se diversifier dans l’alimentation, les vins et les spiritueux, le transport maritime et les hôtels de luxe. En 2007, l’entreprise toujours familiale « Docteur August Oetker KG » dirigée par la quatrième génération de la famille Oetker et dont le siège est toujours situé à Bielefeld, emploie 22680 personnes et génère un chiffre d’affaires net de plus de 7 milliards d’Euros.(source: Oetker Collection)En 1891, le Dr. August Oetker, un pharmacien de Bielefeld inventa la levure chimique dans une pièce à l’arrière de son officine. Ce fut le début d’un empire qui mènera la marque «Dr.Oetker » au succès. Le groupe Oetker qui ne cessera de s’agrandir, se diversifier dans l’alimentation, les vins et les spiritueux, le transport maritime et les hôtels de luxe. L’entreprise toujours familiale « Docteur August Oetker KG » dirigée par la quatrième génération de la famille Oetker et dont le siège est toujours situé à Bielefeld, emploie 26 000 personnes et génère un chiffre d’affaires net d'envirin 11 milliards d’Euros.(source: Dr.Oetker Gruppe)
Le discours haineux de ce voyageur de 1958 contre le pudding bielefeldois a dû être le début prémonitoire de la "fin mystérieuse et dramatique" d'une ville d'environ 330 000 habitants.
L'affaire s'appelle « LE COMPLOT DE BIELEFELD » évoquant de multiples preuves que cette ville allemande n'existe pas.
Voir l'article du journal "Westdeutsche Allgemeine Zeitung" du 29/11/2012: La théorie du complot de Bielefeld a une supportrice éminente. Lors d'un discours mardi soir à l'Académie des Arts de Berlin, la chancelière Angela MERKEL précisa, en évoquant la ville de Bielefeld "si jamais elle existe", déclenchant une explosion de rire dans la salle.
Voir le journal "Süddeutsche Zeitung" signalant en janvier 2014 que plus de 1,5 millions d'habitants ont disparus lors du recensement 2013 en Allemagne, - la plupart dans la région de Bielefeld !!!
Cette légende urbaine est devenue culte, en particulier sur le net, depuis que "l'information" a été postée en 1994 sur Usenet par Achim Held, un jeune étudiant en informatique qui explique en 2010: «À l'origine, c'était une blague interne au milieu estudiantin. La blague n'aurait pas fonctionné avec n'importe quelle ville connue. Il fallait que ce soit une ville, sur laquelle personne ne sait rien – comme c'est le cas de Bielefeld».
La ville "pudding"
s'est-elle consommée elle-même ?
************************************************
Environ trois heures plus tard il faisait trop noir pour voir la cathédrale de Cologne pourtant pas loin de la gare; mais la réclame lumineuse au néon pour l'eau de cologne 4711 demandait notre attention.
Début octobre 1794 à l'approche des troupes françaises la ville de Cologne décida de numéroter maisons et bâtiments; la maison dans la Glockengasse ou résida plus tard le parfumeur Franz Maria FARINA recevait le n° 4711.
Une jeune fille peinait avec un très encombrant bagage et une petite valise pour entrer dans le compartiment. Les deux jeunes gens de la Saxe l'aidaient tant qu'ils pouvaient pour monter l'engin dans le filet à bagages. - Elle acceptait avec plaisir de gouter les cigarettes de la RDA fabriquées à Dresde encore à l'état sauvage de la marque Karo sans filtre, faites qu'avec du tabac sans parfums ajoutés et sans exhausteurs de goût.
L'adolescente racontait qu'elle était archère, voulait apprendre le français, et par chance un club parisien de tir à l’arc l'avait contacté, lui avait déjà réservé un logement à Paris et que ce club l'attendait impatiemment depuis des mois pour intégrer ses performances de tir à l'arc dans son équipe. -
La fille s'amusait beaucoup du dialecte parlé par les quatre jeunes gens de Chemnitz, dans son inconscience elle l'appelait le patois à la Walter ULBRICHT (l'homme fort en RDA) dont les discours en saxon étaient la risée d'Allemagne de l'Ouest. - Il est vrai qu'à l'Ouest on refusait d'écouter les paroles de ce politicien d'Allemagne de l'Est en se moquant que de son accent.
Des mois plus tard dans un petit cercle politique à Paris Elle entendait évoquer un journaliste yougoslave (oui, la Yougoslavie existait bel et bien au moins jusqu'à la mort de TITO en 1980) ce refus d'Allemagne de l'Ouest de prêter attention à ce puissant politicien est-allemand; ce journaliste ne maîtrisait pas l'allemand mais écoutait et lisait les traductions; il invitait instamment les Allemands de l'Ouest d'écouter les avertissements venant de l'Est. - Ainsi trois ans plus tard on aurait été peut-être un peu moins surpris le 12 août 1961, quand ce Walter ULBRICHT lança l'ordre de construction du mur de Berlin.
*****************************************************
Quelle chance d'avoir une passion à partager avec d'autres, que ce soit le sport de la jeune fille de Cologne ou une conception de société avec la ferme intention de changer le monde comme les jeunes gens communistes.
Elle était l'Européenne convaincue, aimant l'histoire en général, l'histoire européenne en particulier. L'union était l'unique solution pour les peuples de l'Europe après le "plus jamais ça"!
Petite, Elle avait été persuadée comme tout autre enfant allemand, que Charlemagne était un empereur allemand; maintenant elle savait que sa statue était aussi sur de parvis de Notre Dame de Paris
La France ne s'appelle pas la Gaule, même si les Français se sentent gaulois.
Si jamais les fils et petits fils de Charlemagne ne s'étaient pas disputés l'héritage, on aurait continué à faire vivre l'Europe avec des peuples peut-être pas seulement cousin mais amis.
Toute sa vie sa passion sera l'Europe.
Avant la frontière belge on ne s'était pas aperçu de la disparition du contestateur du "pudding",
La douane belge était aimable, ne contrôlant que superficiellement les passeports et visas, puis peu après les douaniers français ne prenaient pas non plus les six occupants du compartiment fumeur pour des contrebandiers en ce printemps 1958.
- Autant de le dire maintenant, - puis il doit y avoir prescription depuis: elle n'avait emporté que peu de subsides convertibles, car pour l'opinion allemande en ce temps là, la France avait une monnaie plus qu'instable (le 15 avril 1958 : 1 DM = 100,56 francs).
Sa mère avait des relations avec un grossiste en appareils photo à Paris. Elle s'était donc procuré deux appareils à monnayer en France. La différence entre le prix d'achat à Berlin-Ouest et du prix de vente en France devait contribuer aux frais des premiers jours à Paris. - On avait convenu de laisser chez ce grossiste une partie du montant en tant que pécule d'urgence pour éviter d'être démunie totalement en cas de vol.
On s'était décidé d'emporter une Laica M3 et une Agfa Colorflex, le premier appareil reflex d'Agfa en 1958
Les près de vingt heures de voyage arrivaient à leur fin, les banlieues de Paris montraient l'arrière peu alléchant de leur façades; on se dépêche de descendre les valises des filets à bagages, regarde défiler le grouillement de rails, attend le quai avec impatience. - "Adieu" aux co-voyageurs, - on se reverra - sûr, c'est promis !
Sur le quai de la gare du Nord de Paris un comité d'accueil bruyant d'au moins d'une douzaine de personnes pour la jeune archère; - la tante Ruth avec époux pour les quatre communistes de Karl-Marx-Stadt.
Ce soir Elle ne prendra plus le bus de la ligne 32 pour danser jusqu'à 22 heures au son d'un sound à la Bill Haley avec ses amis au club de jazz "Eierschale" au Breitenbachplatz à Berlin-Steglitz; ce soir elle sera seule dans une ville dont elle ne comprenait pas encore la langue et dont elle n'avait pas encore fumé une seule cigarette de tabac noire malfamée.
Elle se trouvait seule sur le quai, mémorisant le nom de l'hôtel simple que l'on avait réservé pour quelques jours proche de la gare du Nord, en espérant que ses latinismes l'aideront à comprendre un peu du français nouveau à conquérir; elle y déposera sa valise et ira dire bonjour à Charlemagne sur le parvis de Notre-Dame.
B o n j o u r P a r i s
***********
Le récit de ce voyage du printemps 1958
montre une chronologie cahoteuse
due aux perceptions non communicables
des différences idéologiques
dans la formation d'un esprit critique.
Les souvenirs ne sont pas linéaires
et ne se conservent pas comme on le souhaite.
bientôt
il y aura une suite
Kommentar verfassen